L'alchimie narre des histoires, belles et captivantes, folles, fantastiques, comme on n'en connaît guère dans la réalité. Elle est aussi porteuse de rêves : d'une vie et d'un monde meilleurs, du métal pur bien entendu, d'un âge d'or dominé par l'astre du jour dont l'éclat a inspiré son titre à l'un des plus beaux manuscrits illustrés, le Splendor solis.
C'est en images, plus qu'en mots, que les histoires de l'alchimie se racontent le mieux. Elles se déploient sous toutes les formes : manuscrits enluminés, livres imprimés, dessins, planches gravées ou peintures de chevalet. Elles paraissent isolément ou en séries.
C'est par le discours philosophique que les paraboles et les allégories de l'alchimie spéculative ont pu être mises en récit et que son langage figuré a pu être traduit concrètement en images. Platon concevait la philosophie comme une basilikè technè, un "art royal" : ce titre, à l'époque moderne, sera surtout revendiqué par l'alchimie. Dès ses origines, l'alchimie occidentale a été qualifiée "d'art" en référence aux sept arts libéraux. L'épithète "royal", ajouté par la suite, en dit assez long sur l'estime en laquelle l'alchimie n'a cessé de se tenir au cours des siècles.
Une science hermétique qui se dit le plus noble des arts libéraux et s'intitule elle-même "Art Royal" ne pouvait qu'accorder un rôle central à la figure du couple royal. Le roi et la reine représentent l'alpha et l'oméga de l'Œuvre alchimique. Ils engendrent un fils incarnant la promesse de la rédemption portée par l'alchimie et symbolisent les derniers stades de la transmutation, le Petit et le Grand Œuvre, respectivement l'Argent et l'Or.