Dans Les Nuits de Ramazan, Gérard de Nerval nous parle d'Adoniram, serviteur du grand roi Soliman-Ben-Daoud, Salomon, fils de David. Il nous le décrit comme "un personnage sombre, mystérieux. Le roi de Tyr, qui l'avait employé, en avait fait présent à Soliman. Mais quelle était la patrie d'Adoniram ? nul ne le savait. D'où venait-il ? mystère. Où avait-il approfondi les éléments d'un savoir si pratique, si profond et si varié ? on l'ignorait. Il semblait tout créer, tout deviner et tout faire... Il participait de l'esprit de lumière et du génie des ténèbres !" C'était donc un architecte mais aussi un forgeron, je cite à nouveau Gérard de Nerval : "Il avait établi, non loin du temple inachevé [que le roi de Jérusalem destinait à Adonaï (1)], des forges, où sans cesse retentissait le marteau, des fonderies souterraines, où le bronze liquide glissait le long de cent canaux de sable et prenait la forme des lions, des tigres, des dragons ailés, des chérubins, ou même de ces génies étranges et foudroyés, ... races lointaines, à demi perdues dans la mémoire des hommes. Plus de cent mille artisans soumis à Adoniram exécutaient ses vastes conceptions : les fondeurs étaient au nombre de trente mille ; les maçons et les tailleurs de pierres formaient une armée de quatre-vingt mille hommes ; soixante et dix mille manœuvres aidaient à transporter les matériaux. Disséminés par bataillons nombreux, les charpentiers épars dans les montagnes abattaient les pins séculaires jusque dans les déserts des Scythes (2), et les cèdres sur les plateaux du Liban. Au moyen de trois mille trois cents intendants, Adoniram exerçait la discipline et maintenait l'ordre parmi ces populations ouvrières qui fonctionnaient sans confusion.
(1) Adonaï est un des noms de Dieu dans la Bible qui signifie "mon seigneur", "mon maître".
(2) Les Scythes étaient un peuple dont l'habitat s'étendait depuis la Roumanie actuelle jusqu'au Pamir.