Les vingt-deux Arcanes ou Clefs du Tarot constituent, dans leur ensemble, un traité de haute philosophie illustré.
Pour l'homme du XXIe siècle, le livre de la nature reste scellé de sept sceaux tant ses images nous déconcertent, car nous n'entendons plus que les mots. Il n'en a pas toujours été ainsi. Primitivement, le langage humain ne se prêtait à l'expression d'aucune idée abstraite. Les premiers penseurs furent donc condamnés au silence ; faute de mots, ils tracèrent des figures afin d'y rattacher leurs rêves. Ils inventèrent de nouveaux termes, mais en détournant le vocabulaire courant de sa signification usuelle pour lui prêter un sens mystérieux, intelligible aux sages. Ainsi naquit l'allégorie nourrie de symboles qui sont des fenêtres ouvertes sur l'infini.
Le propre du symbolisme est de rester indéfiniment suggestif. Il ne s'adresse qu'aux penseurs capables de méditer et d'approfondir. Chacun y voit alors ce que sa puissance d'observation et sa culture lui permettent d'appréhender, pourvu qu'il ait de l'imagination et qu'il soit accessible à la poésie des choses. Faute de pénétration, rien de profond n'est perçu. Or, depuis que le savoir s'inculque dans les écoles à grands renforts de mots, nous ne savons lire que ce qui est écrit en caractères alphabétiques et nous ne parvenons plus à discerner le sens d'une image.
Le Tarot nous convie à l'effort qui, dégageant notre esprit de l'emprise de la pensée d'emprunt, lui permettra d'acquérir des idées qu'il ne devra qu'à lui-même. Car le vrai secret reste à jamais incommunicable. Pour le posséder, il faut le découvrir au-dedans de soi-même en se consacrant au travail de l'esprit, indispensable à cet effet. On ne s'initie aux mystères que par soi-même.
C'est dans les années 1926-1927 qu'Oswald Wirth publie Le Tarot des imagiers du Moyen Âge dont il nous confie la genèse : "Avec Stanislas de Guaita, je me suis mis au travail pour acquérir la science du symbolisme m'autorisant à reconstituer le Tarot dans le dessin et les couleurs, conformément au génie médiéval... M'attaquant tout d'abord au symbolisme constructif des Francs-Maçons, je fus amené à le comparer à celui des Alchimistes, qui traduisent en images tirées de l'ancienne métallurgie l'ésotérisme initiatique, si judicieusement adapté par les tailleurs de pierre du Moyen Âge à la pratique de leur art.
Dès que l'on parvient à faire parler les symboles, ils dépassent en éloquence tous les discours, car ils permettent de retrouver la Parole perdue, c'est-à-dire l'éternelle pensée vivante dont ils sont l'expression énigmatique."
Oswald Wirth, dans ses efforts de déchiffrement des compositions symboliques du Tarot, nous souffle mystérieusement la première lettre de cet autre Mutus Liber, afin de nous mettre sur la voie de la seconde qui nous aidera à décrypter cette philosophie sagace que les symbolistes du Moyen Âge nous ont léguée.
Nous lui emprunterons ses précieux commentaires parus, en 1966, dans la Bibliothèque des grandes énigmes, chez Claude Tchou, éditeur. Oswald Wirth dessina les 22 lames des Arcanes majeurs du Tarot de Wirth qui fut publié pour la première fois en 1889 dans une édition en couleurs, au tirage limité à cent exemplaires, portant le titre : Le Livre de Toth. Nous devons à Michel Siméon la reproduction du Tarot qui illustre notre propos.
Deux aspects ont été retenus dans cette analyse : le rapport des vingt-deux arcanes avec
l'Alchimie et
la Franc-Maçonnerie.